Une Pluie sans fin

Une Pluie sans fin est un thriller policier dramatique chinois, sorti en novembre 2017 en Chine et en juillet 2018 en France. Il est écrit ainsi que réalisé par Dong Yue, qui signe son premier long-métrage en tant que réalisateur. On y retrouve Duan Yihong, qu’on a pu voir dans The Dead End (2015), Jiang Yiyan, qu’on a pu apercevoir dans Le Règne des Assassins (2010), Yuan Du, dans The Assassins (2012) et ensuite  Chuyi Zheng, dans Explosion (2017). Aux amateurs de polars asiatiques, ce film vous évoquera sans aucun doute Memories of Murder de Bong Joon-Ho ou encore The Chaser d’Hong-jin Na, qui sont les plus réputés d’un genre souvent désespéré. Ce métrage a notamment remporté le Grand Prix du Festival International du Film Policier de Beaune en 2018.

Depuis quelques années, le cinéma chinois propose des métrages qui, sous couvert d’une histoire policière, criminelle, mystérieuse, qui nous invite à une réflexion sur les mutations de la société, des dérives que cela engendre mais aussi de l’impact que cela peut avoir sur une population en mal de repère, de cadre ou même d’orientation. On remarque Black Coal  de Diao Yinan, paru en 2014, et A Touch of Sin  de Jia Zhangke, paru en 2013 qui allaient déjà dans ce sens. Une pluie sans fin ou The Looming Storm pour la distribution internationale, s’inscrit dans ce genre assez particulier.

L’histoire proposée par Une pluie sans fin se déroule principalement en 1997, peu de temps avant la rétrocession de Hong Kong à la Chine et nous invite à suivre Yu Guowei (Duan Yihong), un responsable de la sécurité d’une usine surnommé « Detective Yu », qui rêve secrètement d’intégrer la police. Une série de meurtres dans le secteur proche de l’usine va l’inciter à mener sa propre enquête. Il pense qu’en identifiant et en neutralisant l’auteur de ces meurtres, il pourra voir son avenir s’améliore en réalisant son rêve, celui d’intégrer la police. Sur les traces du criminel, il va jusqu’à monter un stratagème afin de capturer le meurtrier. Cependant, rien ne va se passer comme il l’espérait.

Dong Yue, installe un climat très glauque, aidé en cela par la sublime photographie de Cao Tao. Une ville située à proximité de trois usines de sidérurgie. Les bâtiments sont gris, sinistres à souhait, les habitants arborent des vêtements en adéquation avec leur environnement ce qui rend l’ensemble particulièrement lugubre. L’ambiance est triste et la pluie est omniprésente. Jamais un film n’aura aussi bien porté son titre. On peut donc facilement être tenté de faire le rapprochement avec Seven (1995), le côté mystique, religieux en moins.

En substance, ce métrage montre la volonté de chacun à vouloir de s’extirper de l’endroit où il se trouve afin d’accéder à une ville meilleure. Yu Guowei ambitionne de s’élever socialement, Yanzi rêve d’ouvrir un salon de coiffure à Hong Kong, et l’officier de police Zhang (Yuan Du) ne pense qu’à l’heure de sa retraite où il pourra se retirer dans son village d’enfance. Une Pluie sans fin nous offre donc une observation sociologique de la société chinoise et de son évolution à ce moment clé de l’histoire de ce pays à travers une sordide histoire de serial killer.

Tout ceci est fort intéressant, sauf que cette œuvre est très lente. Par contre ce rythme n’est pas un défaut pour moi, au contraire, je trouve que c’est une force du film et qu’il est nécessaire pour mettre en place tout ce que veut transmettre ce long-métrage. Mais je peux comprendre que cela puisse faire fuir certains. En parlant du scénario, je trouve que l’histoire s’enlise parfois dans des développements secondaires sans réel intérêt. Malgré tout, on peut tout de même sourire à l’apparente naïveté de certains dialogues.

Du côté de la distribution, au début, j’ai eu beaucoup de mal à accrocher sur l’acteur Duan Yihong qui incarne le personnage principal. J’ai trouvé que sa prestation ne correspondait pas totalement avec le rôle qu’il incarnait. Au contraire, j’ai trouvé que Jiang Yiyan était clairement plus juste dans sa performance. L’actrice apporte la bonne dose de tristesse et de mélancolie à son personnage. Enfin, j’ai également bien aimé la prestation de Yuan Du dans son rôle d’inspecteur, où le vieux briscard qui voit et qui comprend la dimension des faits, sans se précipiter et évitant de tirer des conclusions trop hâtives.

En conclusion, Une pluie sans fin  est un bon thriller policier noir comme le charbon, disposant d’une histoire servant de support à une observation sociologique de l’évolution de la société chinoise. L’intrigue est bien orchestrée même avec un rythme poussif. La photographie offre d’excellents visuels volontairement sombres, sinistres afin de renforcer l’ambiance. Les personnages sont tout aussi sombres, à l’esprit morose. En bref je suis tombé sous le charme de ce film. Je conseille vivement ce métrage sauf en cas de déprime.

Léo Jacquet

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